Escort XR3 (1980-1985)

PRINCESSE ERIKA


Après des années d'autos de conception très classique et dotées d'un palmarès en compétition éloquent, Ford opère un virage à 180° pour avancer dans le modernisme : traction avant, roues arrières indépendantes, et moteur transversal coiffé d'une culasse en alliage. Bien qu'un temps il fut envisagé d'appeler cette Ford "Erika", c'est finalement le nom déjà connu et utilisé d'Escort qui fut retenu. Les sportifs n'ont pas été oubliés avec des versions XR3 qui allaient tenter le putch contre la Golf GTI, alors référence de son segment et véritable phénomène de mode...

 

Dans les années 70, l'heure est venue pour Ford d'unifier ses productions qui diffèrent selon les continents. En plus, l'Escort MkII ne rencontre pas le succès escompté, malgré une longue série de succès en compétition aux quatre coins du monde en passant de Wembley-Mexico ou dans les rallies de Grande-Bretagne. Mais malgré cette renommée, la Ford Escort MkII, lancée en 1975, pêchait sur de nombreux points face à la concurrence directe en raison d'un archaïsme (ou conservatisme) technique : propulsion arrière, essieu rigide, moteurs en fonte… Ainsi, le projet Erika doit accoucher de la première " World Car " (comprenez voiture à vocation mondiale) qui pourra être produite à 1 million d'exemplaires chaque année et vendue sur tous les continents. Un temps le nom de code Erika devait être le nom officiel de la future compacte mondiale de Ford, mais la renommée du nom " Escort " d'une part et les hésitations allemandes sur ce prénom de femme amèneront à une décision logique. La future compacte de Ford sera donc bien la 3e génération d'Escort. C'est le 26 septembre 1980 que Ford dévoile cette nouvelle compacte révolutionnaire… pour le constructeur américain ! Car si en effet la concurrence est passée depuis longtemps déjà à la traction avant et aux roues arrières indépendante, c'est une vraie révolution pour un constructeur qui possède dans sa gamme encore les terriblement conservatrices Taunus et Granada ! Les sportifs vont être comblés puisque une variante sportive, l'Escort XR3, sera disponible dès le départ au catalogue de l'Escort. Et comme pour tous les autres modèles de la gamme, l'Escort XR3 propose des prestations dignes de la marque à l'ovale avec un prix serré, un équipement complet et une présentation pimpante. Mais cela suffit-il pour tenter de déloger la très établie VW Golf GTI ?...

 

DESIGN


La Ford Escort MkIII a soigné son physique pour mieux séduire les masses. Des lignes tendues et aérodynamiques à même de séduire tous les continents ont été dessinées par les designers de la firme à l'ovale bleu. Sa carrosserie est plus compacte et son Cx de 0,37 prouve s'il en est le soin apporté à l'aérodynamisme. Si l'Escort conventionnelle sera déclinée en 3, 4 et 5 portes berline et break (la version 4 portes à malle classique sera appelée Orion), la Ford Escort XR3 n'est disponible qu'en 3 portes. Les feux arrières striés sont la marque de fabrique des Escort MkIII non face liftées (les phases 2 à partir de 1986 auront des blocs optique arrière totalement lisses). Le style global est très marqué par les années 80. Comprenez par-là que tout est très carré, génération Rubic Magic Cube oblige ! En toute bonne GTI des années 80 qui se respecte, tous les artifices de la voiture de sport sont présents. Un gros becquet arrière en plastique noir mat surplombe la poupe de l'XR3, des jantes alu de 14 pouces au style " téléphone ", un peu comme sur les Porsche 911 et 944 des années 80, sont montées de série et suprême détail, les rétroviseurs extérieurs sont habillés par des coques peintes ton caisse. L'habitacle accuse le poids des ans en design et ergonomie. Un bon point en revanche pour les sensations, la position de conduite est très basse. Une sensation que l'on ne connaît plus aujourd'hui avec les compactes qui offrent une position de conduite rehaussée pour donner une sensation (fausse !) de sécurité accrue. Les sièges sont confortables mais manquent de maintient latéraux. Dommage car l'assise est bien conçue. Face au conducteur (ou doit-on dire l'apprenti pilote ?) le volant à deux branches en " V " inversé est positionné assez haut. Pour la planche de bord, c'est plastique à gogo, mais l'assemblage est plutôt soigné et résiste bien à l'usure du temps. Si à l'extérieur la Ford Escort XR3 se pare de quelques atours de GTI, l'habitacle reste assez triste et discret. Pas d'instrumentation pléthorique, pas de moquettes voyantes, et les selleries des sièges ne sont pas très gaies. La console centrale de la planche de bord est très dépouillée. A noter les formes très carrées et surtout le bloc de commandes de chauffage et ventilation curieusement disposé à la droite du combiné d'instrument. En option (cela sera de série sur les XR3i phase 1) on pouvait opter pour les feux additionnels rapportés sur la calandre.

 

MOTEUR


Les lettres CVH (Compound Valve angle Hémisphérique) désignent un type de moteur à combustion interne 4 cylindres produit par Ford au cours des années 80 et les années 90. Le moteur CVH (culasse en alliage d'aluminium, angle des soupapes en V, chambre de combustion hémisphérique) a été présenté par Ford en 1980 avec la Ford Escort troisième génération. Il fût plus tard employé sur la Sierra, la Fiesta deuxième génération et en 1983 sur la Ford Orion. Des moteurs ont été construits dans l'usine de Dearborn pour le marché d'Amérique du nord, ainsi que dans la nouvelle usine de Bridgend au Pays de Gales pour le marché européen. La conception du moteur remonte à 1974. Ce moteur est unique en termes de positionnement de ses soupapes montées avec un angle en " V " pour obtenir une chambre de combustion hémisphérique sans employer un double arbre à cames en tête beaucoup plus onéreux. Il comporte également des poussoirs hydrauliques, une première pour un moteur Ford européen. Durant toute sa vie de production (20 ans), le CVH a eu une réputation pour être robuste mais bruyant à vitesse élevée. L'huile de graissage provoque d'important dépôt et encrasse le moteur si le programme d'entretient n'a pas été respecté. La courroie de distribution casse fréquemment au environ de 100 000 à 150 000 kilomètres (encore si l'entretient n'a pas été respecté). Sur l'Escort XR3, en cylindrée 1600, il développe 96 ch DIN à 6000 tr/mn et 13,5 mkg de couple à 4000 tr/mn. On sent l'influence de l'Angleterre dans sa conception, car il est relativement coupleux et disponible à bas régime (comparé à une Peugeot 205 GTI 1,6 litres contemporaine au moteur plus pointu) et grogne et se montre bruyant dans les tours. Il fait preuve néanmoins d'une bonne volonté. Comparé aux autres CVH de la gamme Escort Mk3, celui de la XR3 est dopé par un arbre à cames spécial, un carburateur Weber double corps et une courbe d'allumage spécifique. Cet ensemble mécanique, complété d'une boîte de vitesses à quatre rapports, autorisent de bonnes performances à la XR3 avec 182 km/h en vitesse maxi et un kilomètre départ arrêté franchi en 32 secondes environ.

 

CHASSIS


L'Escort Mk3 innove sur plus d'un sujet puisque le châssis tente de se mettre à jour des standards du segment de l'époque. La propulsion est abandonnée au profit de la traction avant. Fini le survirage et bonjour sous virage. Pour glisser, faudra user du frein à main désormais ! Mais Ford ne s'est pas arrêté en si bon chemin. Les roues arrières sont enfin indépendantes montées sur ressorts hélicoïdaux avec des triangles de suspension et des tirants longitudinaux. Si sur le papier, on pourrait parler d'avancée technique, le résultat est plutôt mitigé en raison d'un confort de roulement très ferme et d'une efficacité moyenne comparé à l'homogénéité d'une Golf GTI ou d'une 205 GTI. Cela sans compter le train avant qui est pas très vaillant et aurait mérité des éléments plus largement dimensionnés et résistants. La direction à crémaillère se montre dure lors des manœuvres et il faut la manœuvre avec poigne lors des enchaînements rapides. Les autres GTI de la même époque étaient affublées du même mal car souvent dépourvue d'assistance de direction. A l'avant des freins à disques ventilés sont montés d'office tandis que de classiques tambours en fonte sont installés à l'arrière. Les jantes alu sont de série, on l'a énoncé plus haut et sont chaussées en 185/60 HR 14. Globalement la Ford Escort XR3 reste une auto vivante et rigolote à conduire. Mais son manque de rigueur peut désarçonner. Et l'état des silentblocs de barres stabilisatrices et des amortisseurs est souvent déterminant dans le bon comportement des XR3.

 

ACHETER UNE FORD ESCORT XR3


Les Ford Escort XR3 sont l'archétype des GTI des années 80. On les trouve aujourd'hui à des prix ridiculement bas, parfois même à moins de 500 euros, comme le modèle qui illustre ce dossier (200 euros seulement !). Comme toutes les voiture de cet âge, la rouille est le point faible : baie de pare-brise, passages de roue arrière et logement de la batterie sont souvent attaqués. Autre point faible, les silentblocs. Outre le fait qu'avec l'age le caoutchouc devient poreux et cassant, ils sont de toutes façons inadaptés à un usage sportif (la fameuse tenue de route " aléatoire " des Ford). Ils seront donc avantageusement remplacés par des silentblocs polyuréthane. Autre faiblesse rencontrée, le tableau de bord sont très sensibles au soleil et sont la plupart du temps complètement fissurés. Evidemment, un tableau de bord en état neuf s'ajoute à la longue liste des pièces introuvables... Pour le reste c'est plutôt bien fini et l'intérieur bien que très austère, vieilli très bien, notamment la sellerie. Les coûts d'entretien reste très bas, à condition de tout faire soit même et de chiner partout pour trouver des pièces au meilleur prix. Pour la nourrir il faut du Super 98 avec l'additif idoine en comptant 10L/100 (merci le double corps !) Et pour les pièces il est très facile de trouver à peu près tout ce qu'on veut en Angleterre ou sur Ebay à peu de frais. Ca va des tôles rapportées pour remplacer un élément trop attaqué par la rouille, aux petits boutons de commande du tableau de bord. En revanche, si vous vous présentez dans le réseau Ford français, les tarifs des pièces donnent le vertige. A noter tout de même que les Escort post 83 ont toutes les mêmes amortisseurs alors que celles pré-83 ont des amortisseurs avec une tête sans coupelle donc légèrement différents... et sont très difficiles à trouver. Auto sans histoire ? Oui mais à condition d'en trouver une en bon état, car le moindre frais de remise en état va dépasser très largement la cote de l'auto.

 

:: CONCLUSION

 
Digne représentante d'une époque aujourd'hui dédiée au confort et à l'aseptisation des autos, l'Escort XR3 distille son lot de sensations avec un peu de bruit et un comportement vivant. Dommage que peu de modèles soient en état concours et que son châssis soit toujours aussi peu rigoureux (et cela ne s'arrange pas sans entretien en vieillissant !). Mais en revanche les recettes de Ford dans les années 80 font toujours recette : présentation pimpante, esprit et ambiance performances et une fiabilité très correcte...

 

Source L'automobile Sportive.


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